Le Linceul des Morts. 209 — Je n'ai pas osé, et vous-même, monsieur le curé, si vous aviez été là, vous ne l'auriez pas fait, non plus. — Si ! je l'aurais fait ; je ne suis pas si peureux que cela, moi. Le curé va, alors, trouver son second vicaire, lui raconte tout, et lui demande s'il veut aller aussi passer une nuit dans l'église ? — Oui, oui, répond-il; j'irai, à la grâce de Dieu, et je ne serai pas si peureux. Je parlerai à cette femme, et je lui deman- derai ce qu'il lui faut. Le second vicaire va donc aussi passer la nuit dans l'église, et il entend et voit ce qu'avaient entendu et vu les deux autres. Mais, comme les deux autres, il n'osa ni bouger du siège où il était assis, ni souffler un seul mot. Le lendemain matin, quand il sort de l'église, à l'heure de Y Angélus, le curé l'attendait, dans le cimetière. — Eh bien, lui demanda le curé, comment les choses se sont-elles passées ? Avez-vous vu quelque chose ? — Oui, monsieur le curé, j'ai entendu et vu comme les deux autres. — Qui est donc cette femme, alors, et que lui faut-il ? Car vous le lui avez demandé, sans doute ? — Je n'ai pas osé le lui demander. — C'est bon ! Vous n'êtes que des poltrons, aussi peureux que des enfants. J'irai moi-même, cette nuit, à l'église, et je saurai ce que c'est que tout cela ; c'est peut-être une âme en peine, qui ne demande qu'une messe ou une prière, pour être délivrée. Mais le curé, bien qu'il dît qu'il n'était pas peureux, n'osait pas aller, seul, passer une nuit dans l'église, et il demanda à ses deux vicaires de l'accompagner. Ils vont tous les trois, et ils sont étonnés de voir les tré- teaux funèbres au milieu de l'église, parés comme pour un riche enterrement ou un anniversaire. — Comment, dit le curé, qui est décédé, dans la paroisse, s'il y a un grand enterrement, demain, ou un anniversaire ? — Nous ne savons pas, répondirent les vicaires, nous n'en avons rien entendu.
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Neuz