dans le trivial. Le français, qui est beaucoup plus cultivé, offre-t-il ce même avantage ? Bien parlé dans une chaire de campagne, il n’est compris que du petit nombre des auditeurs ; mis à la portée de ceux qui ne l’ont pas étudié avec fruit ou appris dans les villes, il perd toute sa dignité ; et à ce prix même il ne peut pas être compris dans toutes les campagnes ; car le mauvais français varie comme le terrain qu’il occupe.
Ceux qui ont de l’antipathie pour le breton accusent beaucoup notre langue de n’être pas la même partout ; d’après eux il n’y aurait pas d’uniformité de langage dans deux paroisses limitrophes en Basse-Bretagne. Mais comment peut-on se trouver dans le vrai en soutenant cette thèse, quand le dialecte de Léon, celui de Tréguier et celui de la Cornouailles diffèrent si peu entre eux, que lorsqu’on en connaît un on les connaît tous les trois ? Et après ces trois dialectes, combien en reste-t-il ? Celui de Vannes, qui ne diffère pas assez des premiers pour constituer une seconde langue bretonne. Comment aussi accorder beaucoup d’autorité à une accusation qui n’est fondée que sur quelque prévention ou sur une ignorance dont l’accusateur se glorifie ? Notre idiome d’Armorique n’a d’ennemis que parmi ceux qui se donnent comme forts en français parce qu’ils se disent faibles en breton, et parmi ceux qui ne sont bretons que de nom, et qui ont par là même des relations difficiles avec leurs voisins du nord.
La langue bretonne est estimée de tous ceux qui en font l’objet d’une étude sérieuse ; et cela seul suffit pour réfuter toutes les objections que la prévention et l’ignorance peuvent susciter contre elle ; cela seul fournit aussi une grande preuve de convenance en faveur de la possibilité et de l’avantage de la bien parler.
- J. Hingant,
- Vikel Hengoat.
- J. Hingant,