Il y a toujours possibilité de bien parler une langue, quand
elle offre à ceux qui l’ont bien apprise, soit par l’étude, soit
par l’usage, les ressources nécessaires pour s’exprimer
correctement. Or, la langue bretonne ne refuse jamais ces ressources
à ceux qui la savent. Elle possède assez de tournures
et de termes pour être parlée avec clarté, avec précision, et
même avec élégance par tous ceux qui en connaissent le génie.
Elle est certainement une des langues les plus riches en tout
ce qui regarde la syntaxe. Les Bretons peuvent presque toujours
faire leur construction de manière à exprimer d’abord
ce qui les frappe le plus. Si leur proposition principale n’est
précédée d’aucune incidente, ils peuvent toujours la
commencer par un participe passé ou par un adjectif ; il leur est
permis d’y mettre l’adverbe avant le verbe qu’il modifie ; le
régime, soit direct, soit indirect, peut précéder ou suivre
indifféremment le verbe dont il est le complément dans cette
proposition ; on y peut également sous-entendre ou exprimer
à volonté le pronom sujet, et souvent aussi ce pronom, étant
exprimé, on peut le mettre avant ou après le verbe dont il
est le sujet.
Cette licence de construction dans la principale, qui n’est précédée d’aucune incidente, prouve que notre langue d’Armorique est très-ancienne, et que les Bretons doivent avoir