Lavarou koz a Vreiz-Izel/NAOVED STROLLAD
Lein hir hag offeren verr |
Pedennou berr a gass d’ann neon, |
Ann Aviel, |
Biskoaz sant n’eo bet |
Ar zant pella, |
Da zantez-Anna neb a ia, |
Itroun Varia ’nn amzer |
Mui a win a zispigner er pardoniou eged a goar. |
E Breiz-Izel pa ziskennan, |
Neb a verv lichou d’ar gwener |
Da noz Nedelek ne gousk ken |
O sent ma bro, ma divallet, |
Deomp da bidi sant Herbot |
Sant Iouen, sant Iann, |
Aotrou sant Ourzal, me ho ped, |
Itroun Varia-Molenez, |
Mar vez Guillou, ra-z-i pell dre sant Herve ; |
Ki klan, chanj a hent, |
Me ho salud, grubuill verrienn ; |
Salud d’e-hoc’h, burlu gwenn, |
Ar penn a zac’h er zac’h, |
Salud, loar gan, |
Ar Werbl hen deuz nao merc’h : |
Denedeo, dened’ec’h, |
Tro, pe me az troio : |
Ar plac’h, war loar goz, |
Kamm, luch, tort ha born, |
N’euz bet biskoaz na kamm na tort n’hen dije itrik fall. |
Ar voualc’h he bek melen |
Ar vran hi deuz tri oad den, tri oad marc’h, |
Pa gomzer euz ann heol e weler he sklerijenn. |
Pa gomzer euz ar bleiz |
Pa voud ar skouarn kleiz, |
Gwennili, gra da neiz |
Skrill a gan war ann oaled |
Eur ginidenn dioc’h ar mintin, |
Eul laouen-dar, |
Pa gan ar goukou warlerc’h gouel Pêr, |
Mar klewfe ar zord, mar welfe ar c’hô, |
Gwasoc’h evid ar raned |
Pan ve ar Siren o kanan, |
Gargantuas easoc’h da zamma |
Gargantuas, pa oa beo, |
Boudedeo[8] |
Boudedeo |
Sotoc’h eget Merlin a red en dour araog ar glao. |
Kenta tud a oa ér bed |
Pa 'z oc’h euz a Gergournadeac’h, |
Araog ma oa aotrou, e neb leac’h, |
Pa n’oa kastel e neb leac’h, |
Riwalen du, Riwalen glaz |
Pe tre, pe lano, |
Debri a ra d’ann neo evel ma ra Rohan[10]. |
- ↑ Les habitants de l’île Molène se défendent, non sans énergie, d’avoir jamais adressé semblable prière à leurs saints. A les entendre, elle leur serait gratuitement prêtée par leurs voisins d’Ouessant, grands railleurs par tempérament, et, aussi, quelque peu jaloux de leur prospérité croissante. Ceux-ci, de leur côté, opposent à cette explication la dénégation la plus formelle. Quoi qu’il en soit, et qu’il s’agisse ici d’une prière ou simplement d’une épigramme, on ne saurait du moins reprocher à cette petite pièce de manquer de couleur locale.
- ↑ Ce Guillou n’est autre que le loup, contre lequel on ne peut trouver de meilleur défenseur que saint Hervé. La légende raconte qu’Ulphroëdus, oncle d’Hervé, avait un âne qu’un loup dévora. Le saint condamna le fauve à remplacer la bête de somme dont il avait fait sa proie, et « c’estoit chose admirable, — nous dit Albert le Grand, — l’intéressant et naïf hagiographe, — de voir ce loup vivre en mesme étable que les moutons, sans leur mal faire, traisner la charrue, porter les faix et faire tout autre service, comme beste domestique. »
C’est en souvenir de ce prodige que, dans les églises bretonnes, on représente saint Hervé accompagné d’un loup qu'il tient en laisse.
Il faut se garder, cependant, de juger sur les apparences : le diable sait prendre toutes les formes, et se montre souvent sous celle d’un loup, dit le paysan breton. Aussi la prudence commande-t-elle de se tenir à la fois en garde contre l’un et l’autre de ces dangereux ennemis. - ↑ Var. Deredewez, ’dewez tec’h,
N’e ket aze man da lec’h.
Bars eun torkadig lann zec’h,
Seiz park euz ar mene,
Ter fantan a drugare,
Lec’h na glewi kog o kana,
Bugel bihan bed o oela.
Var. Dartre (furoncle, herpès etc.), va-t’en loin d’ici !
Ce n’est en ce lieu qu’est ta place.
(Elle est) dans un buisson d’ajoncs desséchés,
Sept champs de la montagne,
Trois fontaines de merci,
Où tu n’ouïras coq chanter
Non plus qu’enfantelet pleurer.
Cette version a été recueillie par mon ami M. Luzel. - ↑ Dans un conte breton très-répandu, une femme surprise par les douleurs de l’enfantement est priée par un moine de ne faire aucun effort qui puisse hâter sa délivrance. — Et, pourquoi cela ? demande-t-elle. — C’est que, répond son interlocuteur, au moment où j’entrais chez vous, j’ai vu la lune en train de se pendre. On se sert de cette expression pour dire que la lune entre dans son croissant. Or, malheur à l’enfant qui vient au monde à cette heure : il est loariet, frappé par la lune, ce qui ne signifie pas toujours lunatique, mais certainement disgracié, soit au physique, soit au moral, et fatalement destiné à être malheureux.
Ce cas n’est pas le seul où l’influence de la lune, jeune ou vieille, soit à craindre pour les mères : elle les menace dans bien d’autres circonstances, et de là le sujet de mille recommandations, et des précautions les plus singulières.
Aujourd’hui encore, dans quelques campagnes, les femmes que certains besoins naturels amènent le soir à quitter leurs maisons, se garderaient bien, pour y satisfaire, de se tourner du côté où la lune se montre. Si, par malaventure, elles étaient enceintes, nul ne sait ce qui pourrait résulter d’une telle inadvertance. - ↑ M. Emile Ernault, de Saint-Brieuc, m’a donné de ce dicton la variante suivante qu’il a entendue à Sarzeau :
Enn enan ’pe huile,
Er zourt a pe gleue,
Den er bet ne bade.
Si orvet voyait,
Si sourd entendait,
Homme au monde ne resterait. - ↑ Se dit des personnes et des choses, et, particulièrement, de tout cri perçant, de tout bruit désagréable. Les Korrigans sont les nains, les gnômes de la mythologie armoricaine.
- ↑ En partant de Plouaret, m’écrit M. Luzel, à qui je dois la connaissance de ce dicton.
- ↑ Nom donné au Juif-Errant, et qui répond exactement à celui de Buttadeus attribué au même personnage légendaire par un auteur du 17e siècle cité par Grœsse (Sage vom Ewigen Juden. Dresde, 1844).
En faisant le même rapprochement à l’occasion du gwerz de Boudedeo, M. Gaston Paris fait observer (Revue Critique du 23 octobre 1869) que ce nom « semble un composé de Thâddée et peut-être de Bar défiguré en But. Mais où, — se demande-t-il, — « le poète breton a-t-il trouvé ce nom généralement remplacé par Ahasvérus ? Le fait est d’autant plus bizarre que s’il fait dire au Juif à un endroit Moi Boudedeo, il semble bien l’appeler ailleurs (str. 2), Absarus, c’est-à-dire Ahasvérus. »
Dans l’état actuel de la bibliographie bretonne, il n’est pas possible, je crois, d’assigner une date tant à la composition du gwerz qu’à l’introduction en Bretagne du nom de Boudedeo. Toutefois, il me paraît acquis que ce nom était tout au moins populaire dans les campagnes armoricaines au 17e siècle. Grégoire de Rostrenen et Dom Le Pelletier le mentionnent, en effet, dans leurs dictionnaires commencés l’un et l’autre vers 1700, sans que rien de la part des deux savants lexicographes permette de supposer qu’il fût d’importation récente.
Pour ce qui est de la bizarrerie résultant de la double appellation donnée au marcheur éternel, elle trouve son explication dans l’ancienne légende dont parle Edgard Quinet (Préface d’Ahasvérus) qui nomme le Juif « Ahasvérus », et, après son baptème, « Buttadeus ». - ↑ Devise de la famille de Châteaufur.
- ↑ On donne au pourceau, dans un grand nombre de localités, le nom de Rohan ou de mab Rohan, fils de Rohan