Ton kantik : Va Doue leun a drugarez.
DISKAN
Truezuz eo ar c’hlemmou a zao dreist kroz ar mor, |
Des cris lamentables retentissent dominant le bruit des flots, les sanglots de pères, mères, enfants, s’élèvent de la côte ! A travers le mugissement de l’orage n’entendez-vous pas appeler, vous appeler, Bretons, au secours, dans l’agonie ?
Qui donc vous appelle, hommes de cœur ? Sous la fureur des vagues, un vaisseau courrait-il se briser contre les écueils, ou une barque de pêcheurs sans gouvernail, sans avirons, aurait-elle sombré dans les horreurs de la nuit ?
Non, non, le sinistre est encore plus affreux, un peuple tout entier, un pays beau comme le nôtre, des hommes infortunés, gens pauvres, au cœur vaillant, une nation généreuse et chrétienne vous demande l’aumône.
Ce pays n’est pas éloigné de l’Armorique ; Bretons, nos rivages et les siens sont chaque marée, baignés par la même mer. Jadis nos aïeux et leurs aïeux étaient parents, amis et sont entrés au Paradis, mourant sur le cœur des saints d’Irlande.
Du pays d’Irlande sur la Bretagne s’est levé, comme un astre sur le monde, la brillante lumière de la foi ; du pays d’Irlande il y a moins de dix ans, quand nous étions écrasés, mourants, nous avons reçu assistance et confort.
Soyons à notre tour des hommes de cœur, montrons-nous, Bretons, reconnaissants envers les Irlandais : depuis longtemps dans la misère, ceux qui n’expirent à cette heure, mourront par la famine d’ici à peu de temps.
Dans leurs demeures, pas un morceau, rien pour se chauffer : de faim et de froid ils grelottent, grands et petits ; pères, mères, enfants, ne sont couverts que de haillons, et ceux qui tiennent debout ressemblent à des fantômes.
Outre la faim cruelle, la douleur déchire leur cœur quand ils voient devant eux leurs plus chers torturés par les souffrances ; le père s’enfuit et cherche un endroit pour expirer à l’écart, et la mère aux lèvres de son enfant, présente une coupe épuisée.
Ils doivent mourir de faim, ils doivent mourir d’angoisses à la porte de l’Anglais, à la porte de gens sans entrailles, ces Irlandais catholiques dont les champs ont été usurpés, ces infortunés à qui l’on a ravi le pain de leurs sueurs, mais leur foi, jamais.
Bretons, aux Irlandais donnez sans retard, donnez à l’instant ! car la faim n’attend pas, la faim est cruelle ; l’aumône de la charité réchauffe les cœurs, éloigne la misère, adoucit l’amertume des douleurs.
Bretons, aux Irlandais, vos frères pauvres infortunés, vos parents, vos amis par le cœur et la foi, pour Dieu, pour notre Sauveur, donnez une aumône pour se sustenter ; donnez de votre pauvreté un sou pour avoir du pain.
Bretons, aux Irlandais, vos frères en Jésus-Christ, donnez laboureurs, donnez, marins, une aumône, et leurs bénédictions chasseront loin de vos têtes les fléaux menaçants de Dieu, les mauvaises saisons, les tempêtes.
- G. MILIN.