Pajenn:Luzel - Maro ar soudart iaouank, 1866.djvu/2

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Kadarnaet eo bet ar bajenn-mañ

Ha penaos es oûn bet lâzet
Gant ar Saozon, en eur stourmad,
Na vô ket kément glac’haret.

Tennet-c’hui brema, pa gârfet,
N’am eûz neb aoûn ’rag ar mârò :
Eeün d’ar galon, kamaraded,
’Gâras Doué, hé vâm, hé vrò !

Roué ann ef hag ann douâr,
A bédenn bep-mintin, bep-nòz,
Mestr ann heoll, ar stéred, ar loar,
Reït d’am îné hò Paradoz !


Fanch Ar Moal

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La mort du Jeune Soldat.


Au pays de France, sur les remparts (tout mon malheur est venu de là), — un jour j’entendis le Benniou qui chantait un air du pays.

Et de jeter aussitôt mon fusil, et de courir vers la chanson : hélas ! c’était mal ; hélas ! ce sera la cause de ma mort !

Bientôt après je fus pris, et conduit devant mon capitaine : hélas ! je suis un homme perdu ! O ma Bretagne, je ne te reverrai plus jamais !

Demain matin je serai conduit devant le régiment, je le sais bien, pour être fusillé sans pitié, malgré mon repentir et ma douleur !

Camarades, écoutez deux ou trois mots seulement, avant de mourir : c’est le benniou qui m’a perdu, avec un air de mon cher pays Breiz-Izel !

Iannik Lagadek, mon ami, avant de descendre mon corps dans la terre, ouvre-le et prends mon cœur, et mets-le dans un mouchoir :

Mets-le dans un mouchoir blanc, pour le porter à ma pauvre mère, au pays : — la pauvre femme sera navrée, hélas ! et répandra bien des larmes ! —

Dis-lui que j’étais un bon soldat, et que j’ai été tué par les Anglais, dans un combat : sa douleur ne sera pas aussi grande.

Tirez maintenant, quand vous voudrez, je n’ai pas peur de la mort : allons, camarades, visez droit au cœur qui toujours aima son Dieu, sa mère et son pays ! —

Roi du ciel et de la terre, que j’invoquais chaque matin et chaque soir dans mes prières ; maître du soleil, des étoiles et de la lune, recevez mon âme dans votre Paradis !

François Le Moal.