Pajenn:Cadic J.-M. - Kanen gouil Yehan - RBV,1897 (T2).djvu/3

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CHANT DE LA SAINT JEAN

ronces, du genêt, des brindilles, enfin tout ce qui est de nature à entretenir le feu. Quelques-uns sont chargés des instruments de musique. Ces instruments sont tout simplement quelques bassins en cuivre de différentes dimensions, et une ou deux poignées de jonc un peu flétri. Il est rare que, dans nos campagnes, il y ait un feu de joie, à la Saint-Jean, sans cette musique tout à fait simple et primitive.

Les fagots, la lande et tous les matériaux apportés sont bien vite entassés, et il faut songer à y mettre le feu. Mais cette opération ne sera pas faite par le premier venu. On doit suivre une sorte de cérémonial qui varie avec chaque contrée. Ici, on tire au sort pour savoir qui aura l'honneur d’allumer le feu de joie ; là, cet honneur est dévolu à la jeune fille réputée la meilleure dans la localité ; ailleurs, c'est un droit réservé à un vieillard ou au plus digne de la compagnie.

Pendant que la flamme pétille joyeusement et s’élève en légers tourbillons vers le ciel, éclairant d’une vive lumière tous les alentours, les fumeurs prennent leurs pipes et les allument au feu de joie. Les jeunes gens doivent veiller à l’entretien du feu, et faire en sorte de prolonger sa durée le plus possible, en lui procurant de nouveaux aliments. Aussi, gare aux tas de lande, de fagots ou de genêts qui sont dans le voisinage : ils risquent fort d’être mis à contribution.

Mais en même temps la musique se fait entendre, et ce sont les femmes et les jeunes filles qui en sont chargées. Accroupies devant les bassins en cuivre, au fond desquels se trouve un peu d’eau, les unes tendent fortement les joncs au travers des bassins ; les autres, mouillant légèrement leurs doigts, les glissent sans cesse le long de ces joncs qu’elles pressent aussi fortement que possible. Les joncs ainsi pressés produisent des sons un peu aigus et perçants par eux-mêmes, mais variés et singulièrement corrigés, adoucis par la sonorité du cuivre des bassins. Cette musique d’un genre si singulier n’a donc rien de désagréable. Elle produit l’effet d’un carillon lointain que tout le monde écoute d’abord en silence et avec plaisir.

Mais bientôt une chanteuse, d’une voix claire et forte, entonne le

TOME XVIII, — JUILLET 1897
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